Rabelais, démographe et utopiste de la population

Par Jean-Noël Biraben
Français

Résumé

BiRABEN Jean-Noël. — Rabelais démographe et utopiste de la population. Né à Chinon vers 1490, mort à Paris en 1553, c'est un des humanistes les plus remarqués pour son érudition. Les audaces de son grand ouvrage sur Gargantua et Pantagruel publié en cinq livres de 1532 à 1564, lui attirent, malgré la protection de François Ier et Henri II, des persécutions auxquelles il échappe difficilement. Ainsi qu'il nous le dit dans son prologue, c'est un message sérieux que nous délivre l'auteur. Faut-il voir la population de Paris en 1530 dans les 260 418 Parisiens noyés par Gargantua ? Ce nombre n'est pas invraisemblable. A plusieurs reprises, Rabelais fait des remarques judicieuses sur la peste. Plus intéressant pour nous, douze ans à peine après l'institution de l'état civil par François Ier, il est probablement le premier à proposer d'en utiliser les statistiques pour analyser des comportements sociaux. Quant aux populations utopiques, il se pose en continuateur de Thomas More (1478-1535) en situant souvent son héros au pays des utopiens. Contrairement à nombre d'utopistes qui suivront et chercheront à établir une société égalitariste, Rabelais, qui croit à la vertu naturelle des hommes, préconise une société élitiste basée sur une bonne éducation où la raison l'emporte sur la passion. Sa devise « fay ce que vouldras » n'est pas, comme on l'a trop souvent interprété, libertine, mais libérale, sinon parfois libertaire.

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